UN HOTEL, UNE PLACE, UNE HISTOIRE...

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Maison ? Hôtel ? Maison en forme d'hôtel ou hôtel dans une maison ? Telle est la question que beaucoup nous pose. Nous, on préfère penser qu'il s'agit d'abord d'un hôtel dans une maison puisque celui-ci en épouse les formes et les contours depuis quasiment un siècle.
Un siècle de cent ans que l'Hôtel du Commerce contemple la place F. Roosevelt du haut de ses trois étages. Un siècle... vraiment ? Ou plus encore ? Car la maison, elle, date du XVIIIe siècle, comme quasiment l'ensemble des hautes maisons entourant le parvis de la cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption. Trois cents d'âge et voici que les rénovations entreprises dans ces dernières années du XXIe siècle existant ont rajeuni la vieille maison en un fringant, cosy et charmant hôtel trois étoiles sans rien perdre de son caractère.
Car ils en ont vu, des choses, cette maison et cet hôtel en plusieurs siècles d'existence. Avant d'être une maison, il a bien fallu que l'endroit soit créé. Pendant les premiers siècles qui ont suivi la fondation de Montauban (1144), la ville est restée à l'abri de sa première muraille et la future place qui est la nôtre n'était qu'un espace défriché. Ce n'est que bien plus tard qu'une seconde enceinte, plus large et plus grande englobe la future place Roosevelt. C'est là, notamment, que s'installe le couvent des Clarisses au XIVe siècle, couvent situé jusque-là hors les murs. Menacées par les guerres contre les Anglais, les Clarisses obtiennent de se réfugier dans les murs de Montauban et plus particulièrement face à ce qui sera le futur Hôtel du Commerce / GEORGE Hôtel. Les guerres de religion vont tout bouleverser et en 1561-1562, les Protestants prennent le contrôle de la ville et de la région. En décembre 1561, le couvent des Clarisses est saccagé de fonds en combles, détruit et ne sera jamais reconstruit. L'espace laissé vide allait donner naissance à la ""place des Monges"" ou ""place des Nonains"", rappelant le souvenir des Clarisses.
Cette place va connaître les jours de marchés et les jours de foires de Montauban. Mais aussi le terrible siège de 1621-1622 où les Protestants de la ville, érigés en une république théocratique, vont repousser tous les assauts des troupes du roi Louis XIII. Mais ne pourront rien en 1629 lorsque le cardinal de Richelieu reprend le contrôle de la ville.

La place des Monges connaît ensuite de profonds changements : les murailles en arrière de l'hôtel sont démolies et donnent naissance au cours des Carmes, aujourd'hui Allée du Consul Dupuy. Sur ordre de Louis XIV est construit la cathédrale Notre-Dame au point le plus haut de Montauban. Elle sera grande, massive et blanche pour être vue de tout le monde, à des kilomètres à la ronde mais surtout pour rappeler aux Montalbanais que la religion catholique est la religion unique du royaume de France. L'on sait aussi que la Place des Monges est un carré parfait de deux cents pieds par deux cents, soit 29,60 x 29,60 m.
C'est au cours du XVIIIe siècle que la maison est érigée, en briques rouges comme l'ensemble des hôtels particuliers présents sur cette place et alentours. C'est également à cette période que s'installent, face à la maison, les Messageries de Toulouse, dans cette autre maison si particulière avec ses cariatides. Là vont et viennent les diligences en provenance ou à destination de Toulouse et de Paris, mais aussi vers Bordeaux, Brive, Cahors... L'activité y est intense et Montauban connaît un nouvel âge d'or commercial. La place porte alors le nom de place d'armes, rappelant que les régiments de la garnison y font leurs prises d'armes et autres revues.
Le 10 mai 1790, la place est le théâtre d'un événement dramatique lié aux événements révolutionnaires et aux tensions religieuses entre la garde nationale de la ville, qui compte beaucoup de Protestants en ses rangs, et une partie de la population catholique et royaliste de Montauban. Les échauffourées commencent sur la place et s'achève dans la cour de la mairie où quatre gardes nationaux seront tués pendant que des dizaines d'autres personnes seront blessées par la fusillade.

Lors de sa venue en juillet 1808, l'empereur Napoléon Ier fit son entrée dans Montauban puis s'arrêta un moment sur la place. Quelques heures plus tard, il donnait son accord impérial à la création du département du Tarn-et-Garonne et dont Montauban devenait la préfecture.
Et la maison est toujours là, bien présente, bien bâtie, témoin muet de tous ces passages et de tous ces événements. En 1917, au plus fort de la Première Guerre Mondiale, la ville de Montauban décide de rentre hommages aux soldats américains venus se battre en France. La place devient alors ""Place des Américains"". Elle gardera ce nom jusqu'en 1945, année où, à l'annonce de la mort du président Roosevelt, la ville de Montauban lui rend hommage en donnant son nom à la place des Américains. La place Franklin Roosevelt vient de prendre son nom actuel.

Et la maison, nous direz-vous ? Au début des années 20, elle devient un hôtel et prend le nom d'Hôtel du Commerce. Pourquoi un tel nom ? A l'époque où l'avion, le TGV, les autoroutes et les voitures n'existent pas, les représentants de commerce élisent pension dans des hôtels qui leur sont souvent dédiés : chambre, restaurant et bar leur permettent ainsi de passer plusieurs jours sur place pour rendre visite à leurs clientèles.
Dans les années 30, l'hôtel devient la propriété de Mr Viguié. Faisant face à son concurrent et néanmoins confrère Hôtel de France, devenu Hôtel du Midi, aujourd'hui Hôtel Mercure, l'Hôtel du Commerce vit les heures sombres de la guerre de 1940. Jusqu'en 1942, Montauban est en zone libre mais la Milice réquisitionne l'hôtel pendant plusieurs mois pour y installer ses bureaux. Heures sombres qui continuent avec l'arrivée des troupes allemandes en 1942. La Kommandantur réquisitionne l'Hôtel du Midi pendant que l'Hôtel du Commerce est réquisitionné pour y héberger des officiers de la place.
La Libération est là et l'Hôtel du Commerce retrouve sa paisible activité hôtelière. Dans les années 50, Marthe et Laurent Passedat rachètent l'hôtel et vont le gérer jusqu'en 2014, pendant cinquante-huit ans.
L'Hôtel du Commerce et le vélo entretiennent une relation privilégiée : de 1950 à 1965, l'Hôtel devient le siège du Véloce Club de Montauban, club mythique s'il en est puisque fondé le 18 mars 1877 par Léon Saint-Faust. En 1891, l'administration et la rédaction du bulletin officiel du VCM sont installées ""Montauban, Place d'Armes, 17"", ce qui correspond à l'ancien Grand Café du Nord qui se trouvait alors situé ""Place d'armes et rue Porte-du-Moustier"". Cette ""tradition"" du vélo à l'hôtel se poursuit de nos jours avec l'obtention du label ""Accueil Vélo"" pour la seconde année consécutive (2019 et 2020).

En 2014, Laurent Rotiel devient le nouveau propriétaire de l'établissement. A partir de 2016, le destin de l'hôtel change profondément. Sa façade est restaurée et peinte en rouge, pour rappeler le souvenir de la brique de la façade et des trois caves voûtées (malheureusement inaccessibles à notre clientèle), le tout encadré d'une formidable structure en pierre de taille...
De 2016 à 2019, l'Hôtel du Commerce est entièrement rénové de l'intérieur, de la réception à la salle des petits déjeuners, du petit salon à la salle de réunion et, bien entendu, l'ensemble des 27 chambres de l'établissement dont pas deux ne se ressemblent.
Dotés des services les plus modernes de son temps, l'Hôtel du Commerce se prépare doucement mais sûrement à changer prochainement de nom pour devenir le GEORGE Hôtel ***. Une page d'Histoire se tournera mais sa destinée d'accueillir des visiteurs de passage, étrangers ou nom, pour le travail ou à la découverte de Montauban, continuera plus que jamais.
Et au printemps 2021, la vielle maison et le nouvel hôtel contempleront alors le nouveau parvis de la cathédrale Notre-Dame.